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À fleur de peau, à fleur d'image...

Sandrine Rodrigues nous propose ici une série de petits formats montrant des vases et des fleurs.Dans chacune d'entre elles, une photo en noir et blanc, imprimée sur du papier dessin dialogue avec une tache colorée le plus souvent, posée à même l'image. Une forme d'accident pictural côtoie le temps figé et objectif du cliché photographique, le geste de peindre celui de la prise de vue. À travers ces images hybrides, le thème de la nature morte -déjà revisité de mille façons dans l'histoire de l'art et dans les pratiques plastiques contemporaines- joue ici sur deux mediums utilisés dans un même espace : celui de l'oeuvre. De ce décalage entre la perfection quasi clinique de la photographie et le geste pictural revendiqué naît un écart poétique où deux temps se conjuguent : celui du bouquet dans la perfection de sa composition et celui d'une tache incongrue que notre regard pourrait interpréter comme une fleur déliquescente. Caravage nous avait déjà fait le coup de la feuille de figuier se fanant ou du fruit taché entamant son lent processus de pourrissement mais il restait dans les codes de la mimesis.Ce qui nous est offert ici pourrait s'apparenter à des petites vanités où la représentation se joue entre le flou et le net, entre ce que nous savons et ce que nous voyons. Si Godard disait préférer les idées nettes aux images floues, il est ici pris en défaut : deux états de la matière, l'un maîtrisé et l'autre pas se conjuguent dans les images pour décliner le réel. La tache devient cet espace informe où notre imaginaire se niche et développe un regard propre à rêver une certaine vérité des choses. En photographie argentique, l'accident, la tache étaient redoutés au cours du travail en chambre noire. En s'en emparant pour la mêler avec une intention plastique au rendu du cliché imprimé qui sert de base à son travail, Sandrine nous renvoie ici à toutes les incertitudes de notre regard : la sagesse convenue de l'image du bouquet y est perturbée et se heurte à l'incongru de ce qui nous apparaît a priori illisible.C'est sans doute ici dans cet entre-deux que l'art se révèle son sens le plus précieux et que commence notre métier de spectateur...

Nicole Vitré-Méchain pour Sandrine Rodrigues, Décembre 2024

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